Page:Webb - Sept pour un secret, 1933.djvu/69

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
47
sept pour un secret…

Ce sera tout ce qu’il y a de gentil : nous ferons semblant d’être chez nous… comme mari et femme.

Robert rougit et se détourna, brusquement intimidé, peut-être à cause d’Isaïe, peut-être parce qu’il se souvenait de Gillian dans la prairie.

— Non, dit-il.

— Si ! je m’en vais dès le nouvel an.

— Où ? fit-il en se retournant vivement.

— À Silverton… je vous raconterai en prenant le thé. Pour l’instant, aux caramels !

Elle s’en allait… ce serait leur dernière journée de jeux enfantins. Quand elle reviendrait ce serait une dame… fiancée, mariée même, qui sait ? Il passerait un peu plus de temps demain à fendre du bois. Il gratta la boue de ses chaussures et entra.

— D’abord le beurre, dit Gillian. Elle courut à la laiterie où les pains jaunes et ronds, tous couverts d’une mousseline, reposaient sur un linge bien blanc Elle en mit deux dans sa poêle, car elle n’était jamais pour faire les choses à moitié.

— Remuez-vous donc, lui dit-elle. Quel lambin vous faites !

Robert se lavait les mains à la brosse dans l’arrière-cuisine et se dépêcha. C’étaient de belles mains, grandes, fortes, sur lesquelles on pouvait compter : ce qu’elles entreprenaient, elles le finissaient. Les animaux de la ferme les aimaient, les gens auxquels il serrait la main au marché sentaient dans la sienne, en quelque sorte, une promesse de protection et lui auraient confié leur vie, ou même leurs billets de banque. C’étaient des mains qui auraient pu l’aider à devenir un grand chirurgien. Le vétérinaire du pays, qui les avait remarquées, lui proposa de le prendre comme associé, mais il refusa, n’aimant pas voir souffrir des êtres vivants plus souvent