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Page:Webb - Sept pour un secret, 1933.djvu/96

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— Et vous aviez déjà fait ce rêve ?

— Toutes les nuits, quand maman me berçait, le rêve revenait, toujours le même. De petites collines rondes, comme le Pyatt de Gwlfas, et d’autres un peu plus grandes, comme « la lointaine colline verte », et tout autour en arrière, de hautes montagnes noires et pointues, et des rubans d’argent brillant qui en descendaient et qui étaient des rivières.

— Et c’était un rêve favorable ?

— Je ne peux pas vous dire ce qu’il avait de bon. C’était comme toutes les choses agréables, comme une glissade sur de la glace bien unie, comme le plaisir de galoper en descendant une côte et la douce émotion de la Sainte-Cène, la joie de ramer sur la rivière et de dîner au restaurant — ce qui ne m’arrive jamais — et de trouver une violette en hiver.

— Mais tout s’est brisé ?

— Ah oui, comme un fil de la vierge se casse quand le vent siffle dans la cheminée. Alors les esprits du mal m’ont marquée d’un signe et je suis une enfant de l’enfer.

— Non.

— Si, et je n’y peux rien. Chaque fois que les bons rêves se présentent, les mauvais les détruisent. Dès que j’aperçois les prairies d’un vert brillant, les sources moussues, j’ai peur.

— Il ne faut pas.

— Mais si ces démons revenaient me poursuivre, je mourrais.

— Ils ne viendront pas : je vous protégerai.

— Vous ? Oh, Robert, vous n’êtes pas assez fort.

— Je le suis, parce que je…

— Oh, vas-tu marcher, sale jument ! lança Robert avec colère.