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LETTRE À SON FRÈRE

17 avril 1943
Mon cher frère,

Je ne t’ai pas écrit jusqu’ici parce que c’est vraiment difficile pour moi de savoir quoi t’écrire, et décourageant de penser à l’intervalle entre le départ et l’arrivée de la lettre.

M. ayant parlé de toi à C. j’ai cru devoir lui faire ta biographie complète. Résultat si tu adhérais à la France Combattante — par exemple par une lettre à R., avec considérants — on serait fort content…

Du point de vue principes, à mon avis, l’adhésion implique seulement l’affirmation qu’il était juste et beau, en juin 1940, de proclamer le maintien de la France dans la guerre ; ce dont, pour moi, je n’ai jamais douté.

En dehors de cette indication, je ne peux malheureusement t’en donner aucune autre. Réfléchis (en essayant d’éliminer les faux effets d’optique) et fais pour le mieux.

J’ai écrit à nos parents que j’aime Londres ; mais la vérité est seulement que j’aimerais passionnément Londres si l’état du monde me laissait ma liberté d’esprit. En fait, je ne peux jouir de rien.