Page:Weil - Écrits de Londres et dernières lettres, 1957.djvu/94

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à la majorité et à l’opposition met par elle-même obstacle à ce que le souci du bien public soit un mobile de l’action politique.

Bien plus, l’opposition, d’après ce texte, doit avoir un chef, qui a seul le pouvoir de déposer une motion de censure !… Dès lors, si le gouvernement se concilie cet homme, il peut faire tout ce qu’il veut.

Un résultat paradoxal est que le gouvernement peut impunément aller à l’encontre des vues de sa propre majorité. Il est bon, certes, qu’il ne soit pas esclave de sa propre majorité, mais c’est aller un peu loin que de l’encourager à gouverner contre elle !

L’Assemblée siégerait en tout entre un mois et deux mois par an. C’est singulier pour l’organisme dépositaire de la souveraineté. Il est évident que dans ces conditions les séances ne seront qu’une façade, et que le jeu politique s’accomplira en réalité tout le long de l’année, clandestinement, dans les partis.

Il y a les commissions, il est vrai, qui apparemment siègent toute l’année. Mais il n’y a entre elles aucune liaison officielle. Il y aura le lien clandestin des partis.

Le gouvernement a le monopole de l’initiative en matière de lois (bien que les commissions et le Conseil National consultatif puissent lui soumettre des projets). L’Assemblée ne peut qu’accepter telles quelles ou rejeter les lois qui lui sont présentées. Autrement dit, le gouvernement exerce le pouvoir législatif, avec droit de veto de la part de l’Assemblée. Singulier renversement !

(On ne voit pas bien quel pouvoir donne à la section de législation du Conseil d’État — organisme irresponsable — la tâche de « rédiger définitivement » les projets de lois.)

Il est vrai qu’on ne fait plus aujourd’hui aucune distinction entre la législation et l’activité gouvernementale.

En conclusion, la Constitution esquissée ici semble