Page:Weil - La Condition ouvrière, 1951.djvu/207

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contre des menaces de législation étroite de l’embauchage, je ne la considère pas comme exclue ; car il s’agit de mesures qui atteignent chacun directement dans ce qu’il croit être ses œuvres vives. Mais ce n’est qu’une manifestation. Ce qui est redoutable, ce n’est pas cela ; c’est l’état d’esprit avec lequel sera appliquée une législation peut-être bureaucratique, peut-être tatillonne, peut-être anti-économique, peut-être même anti-sociale ; une législation qui ne sera pas comprise par une partie de ceux à qui elle s’appliquera. Il faut une législation qui soit comprise, et pour cela qui ne transforme pas du tout au tout le régime actuel ; qui empêche les abus sans prétendre régler l’exercice courant de l’autorité patronale. Et elle est possible. Mais il faut la vouloir et ne pas se laisser entraîner à jeter le désordre, sous le prétexte d’établir un peu d’ordre ; à exaspérer une partie, et la plus active peut-être de l’Économie, sous le prétexte d’établir la paix sociale ; à promulguer, avec un gouvernement aussi faible que celui que nous avons, des lois que ce gouvernement sera, dès l’origine, incapable d’appliquer.

Il faut accepter qu’il y ait des hommes bedonnants et qui ne raisonnent pas toujours très juste, pour qu’au lieu de quelques chômeurs à peu près secourus, il n’y ait pas un peuple entier crevant de faim et exposé à toutes les aventures.

A. Detœuf.