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« Quand on a sa vie à gagner » : cette expression a en partie pour cause le fait que certaines ouvrières, mariées, travaillent non pour vivre, mais pour avoir un peu plus de bien-être. (Celle-là avait un mari, mais chômeur.) Inégalité très considérable entre les ouvrières…

Système de salaire. Bon coulé au-dessous de 3 fr. On règle les bons coulés, à la fin de la quinzaine, en petit comité (Mouquet, le chrono… Le chrono est impitoyable ; M., sans doute, défend un peu les ouvrières) à un prix arbitraire — des fois 4 fr., des fois 3 fr., des fois au taux d’affûtage (2 fr. 40 pour les autres). Des fois on ne paie que le prix effectivement réalisé, en déduisant du boni la différence avec le taux d’affûtage. Quand une ouvrière se juge victime d’une injustice, elle va se plaindre. Mais c’est humiliant, vu qu’elle n’a aucun droit et se trouve à la merci du bon vouloir des chefs, lesquels décident d’après la valeur de l’ouvrière, et dans une large mesure d’après leur fantaisie.

Le temps perdu entre les tâches ou doit être marqué sur les bons (mais alors on risque de les couler, surtout pour les petites commandes) ou est déduit de la paye. On compte alors moins de 96 h. pour la quinzaine.

C’est un mode de contrôle ; sans cela on marquerait toujours des temps plus courts que ceux effectivement employés.

Système des heures d’avance.

Histoire racontée. Mouquet : sœur de Mimi va le trouver pour se plaindre du prix d’un bon ; il la renvoie brutalement à son travail. Elle s’en va en rouspétant. 10 m. — il va la trouver : « Qu’est-ce qu’il y a ? » et arrange l’affaire.

« Il n’y en a pas beaucoup qui osent couler les bons. »



Troisième semaine.


Tâches :


Lundi 17, matin. — Au petit balancier.

Planage toute la matinée — fatigant — coulé.

Le souvenir de mon aventure au grand balancier me fait craindre de ne pas frapper assez fort. D’autre part il ne faut pas, paraît-il, frapper trop fort. Et le bon comporterait une vitesse qui me semble fantastique…

Fin de la matinée : rondelles dans barres de métal, avec presse lourde de Robert.