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Cause des mauvaises lectures : l’opinion publique, les passions.

L’opinion publique est une cause très forte. On lit dans l’histoire de Jeanne d’Arc ce que dicte l’opinion publique contemporaine. Mais elle a été incertaine. Et le Christ…

Dans les problèmes moraux fictifs, la calomnie est absente.

Quel espoir a l’innocence si elle n’est pas reconnue ?

Lectures. La lecture — sauf une certaine qualité d’attention — obéit à la pesanteur. On lit les opinions suggérées par la pesanteur (part prépondérante des passions et du conformisme social dans les jugements que nous portons sur les hommes et sur les événements).

Avec une plus haute qualité d’attention, on lit la pesanteur elle-même, et divers systèmes d’équilibre possibles.

Lectures superposées : lire la nécessité derrière la sensation, lire l’ordre derrière la nécessité, lire Dieu derrière l’ordre.

« Ne jugez pas. » Le Christ lui-même ne juge pas. Il est le jugement. L’innocence souffrante comme mesure.

Jugement, perspective. En ce sens tout jugement juge celui qui le porte. Ne pas juger. Ce n’est pas l’indifférence ou l’abstention, c’est le jugement transcendant, l’imitation du jugement divin qui ne nous est pas possible.