Page:Weil - La Pesanteur et la Grâce, 1948.djvu/227

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l’ambition. Mais pourtant le social n’est pas absent de l’amour (passions excitées par les princes, les gens célèbres, tous ceux qui ont du prestige…).

Il y a deux biens, de même dénomination, mais radicalement autres : celui qui est le contraire du mal et celui qui est l’absolu. L’absolu n’a pas de contraire. Le relatif n’est pas le contraire de l’absolu ; il en dérive par un rapport non commutatif. Ce que nous voulons, c’est le bien absolu. Ce que nous pouvons atteindre, c’est le bien corrélatif du mal. Nous nous y portons par erreur, comme le Prince qui se prépare à aimer la servante au lieu de la maîtresse. Ce sont les vêtements qui causent l’erreur. C’est le social qui jette sur le relatif la couleur de l’absolu. Le remède est dans l’idée de relation. La relation sort violemment du social. Elle est le monopole de l’individu. La société est la caverne, la sortie est la solitude.

La relation appartient à l’esprit solitaire. Nulle foule ne conçoit la relation. Ceci est bien ou mal à l’égard de… dans la mesure où… Cela échappe à la foule. Une foule ne fait pas une addition.

Celui qui est au-dessus de la vie sociale y rentre quand il veut, non celui qui est au-dessous. De même pour tout. Relation non commutative entre le meilleur et le moins bon.

Le végétatif et le social sont les deux domaines où le bien n’entre pas.

Le Christ a racheté le végétatif, non le social. Il n’a pas prié pour le monde.

Le social est irréductiblement le domaine du