Page:Weil - Lettre à un religieux, 1951.djvu/85

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prême de la justice de Dieu ce qu’on allègue toujours (exemple Job) pour L’accuser d’injustice, à savoir qu’Il favorise indifféremment les bons et les mauvais.

Il devait y avoir dans l’enseignement du Christ la notion d’une certaine vertu d’indifférence, semblable à ce qu’on peut trouver dans le stoïcisme grec et la pensée hindoue.

Cette parole du Christ rappelle le cri suprême de Prométhée : « Ciel par qui pour tous la commune lumière tourne… »

(De plus cette lumière et cette eau ont probablement aussi une signification spirituelle, c’est-à-dire que tous — dans Israël et dehors, dans l’Église et dehors — sont également inondés de grâce, bien que la plupart la refusent.)

Cela est tout à fait contraire à la conception courante selon laquelle Dieu envoie arbitrairement plus de grâce à l’un, moins à l’autre, comme un souverain capricieux ; cela sous le prétexte qu’il ne la doit pas ! Il doit à sa propre bonté infinie d’accorder à chaque créature la plénitude du bien. Il faut plutôt penser qu’il répand continuel-