Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/192

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en dévisageant ma robe de chambre : « Je vous dis : avez-vous quelque chose de neuf ? » Ce n’est toujours pas mon chapeau ; je n’ai pas eu le temps de le passer au fer avant de quitter Paris. — « Si v’plaît ! Avez-vous quelque chose de neuf ? Ouvrez la valise, je dis, » — Le douanier devenait sec et la situation tendue. Heureusement, le mot de valise m’illumine. Le douanier veut tout simplement savoir, curiosité naturelle chez ce fonctionnaire, ce que j’ai à déclarer. Quelque chose de neuf ! Sens admirable, sens conforme au génie et à la finesse de la langue et que nous avons laissé se perdre, nous autres, à Paris ! Quelque chose qui n’est pas encore usé : des cigares qu’on peut encore revendre au delà de la frontière, parce qu’on n’en a pas mordillé le bout ; des pièces d’étoffe qui seront un objet de trafic parce qu’on n’en a pas fait jusqu’ici des culottes, du neuf, enfin de la contrebande.

Les Belges sont pleins de ces tropes. Quand la chaleur les accable, ou que le froid les gèle, ou qu’ils tombent de fatigue, ils vous disent : « Je suis si stouf que je ne puis me ravoir. » La locution est charmante. C’est un plaisir de grammairien de s’entretenir avec le cocher qui vous fait voir la ville. Il appelle les kiosques à journaux des aubettes, et les appartements à louer des quartiers. Vous lui dites : « Qu’est-ce que c’est que ce beau