Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/222

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chine à vapeur que nous offre le théâtre ne donne pas la centième partie de l’impression de merveilleux et ne rend pas la centième partie de la vivacité du spectacle que nous présente, passant devant nous, un train réel de chemin de fer, non pas même l’express sans pareil du Pacifique ou l’Orient-Éclair, mais tout bonnement le train de Batignolles à Grenelle. J’en dirai à peu près autant de l’explosion de la Henrietta en mer, en vue de Liverpool. Décor superbe tant qu’on voudra ! L’explosion elle-même, quelque effort qu’elle ait coûté à la direction, est et ne saurait être que mesquine.

Au contraire, quand les directeurs, les auteurs et les décorateurs se tiennent dans les conditions du décor théâtral possible, dans les limites où l’art du décor et de la mise en scène est au point de se mesurer avec la vérité et la nature, cet art devient pour le spectateur une source vive et fraîche de plaisirs et de transports. Empressons-nous de dire que c’est ce qui arrive plus d’une fois avec le Tour du Monde. Le site alpestre de l’escalier des Géants dans l’Amérique du Nord, la nécropole indienne, la ville malaise, le combat avec les Sioux, les cortèges asiatiques sont autant de créations qui ravissent les yeux. Un riche ballet bien réglé remplit le septième tableau. Tout éblouissant que soit le corps de ballet du Châtelet, il laisse à désirer pour ce qui regarde le