Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/239

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toutes les mémoires ; elles ont pénétré, elles ont façonné des générations de chrétiens. C’est un cœur gonflé de Dieu qui y déborde ; c’est un esprit vivifié de Dieu et tout plein de la plus saine extase religieuse, qui y frémit et qui y prophétise. La magnificence, l’action et la majesté du langage y semblent comme un reflet de Dieu, et, si ce n’était un sacrilège, on serait tenté de dire qu’Esther et Athalie achèvent la révélation et la couronnent. À s’en tenir au premier des deux drames et au personnage principal de ce drame, Esther est un type adorable de la fille et de la femme selon Dieu. Oh ! si l’on comparait d’un peu près l’Esther du Livre d’Esther avec l’Esther de la tragédie de Racine, on trouverait que Racine a un peu changé et embelli l’Esther originale.

Dans le langage de l’exégèse orthodoxe, on exprimerait la métamorphose en disant que Racine a substitué à l’Esther selon la loi ancienne une Esther selon la loi nouvelle. Mais il faudrait se corriger tout aussitôt — c’est un point que je note en réponse à ceux qui, comme Saint-Évremond, accusaient Racine de ne point observer exactement les mœurs historiques — il faudrait, aussitôt après avoir relevé dans Esther l’empreinte chrétienne, revenir sur la chose dite et ajouter qu’Esther est cependant bien une femme biblique, une fille de Jacob et d’Abra-