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l’île du docteur moreau

étendue désolée couverte de sable blanc, puis une autre de taillis enchevêtrés.

Sur ma droite, un faible bruissement m’inquiétait. D’abord je crus à une fantaisie de mon imagination, car, chaque fois que je m’arrêtais, je ne percevais dans le silence que la brise du soir agitant la cime des arbres. Quand je me remettais en route, il y avait un écho persistant à mes pas.

Je m’éloignai des fourrés, suivant exclusivement les espaces découverts et m’efforçant, par de soudaines volte-face, de surprendre, si elle existait, la cause de ce bruit. Je ne vis rien et néanmoins la certitude d’une autre présence s’imposait de plus en plus. J’accélérai mon allure et, au bout de peu de temps, j’arrivai à un léger monticule ; je le franchis, et, me retournant brusquement, je regardai avec grande attention le chemin que je venais de parcourir. Tout se détachait noir et net contre le ciel obscur.

Bientôt une ombre informe parut momentanément contre la ligne d’horizon et s’évanouit. J’étais convaincu maintenant que mon fauve antagoniste me pourchassait encore, et à cela vint s’ajouter une autre constatation désagréable : j’avais perdu mon chemin.