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l’île du docteur moreau

Je continuai, désespérément perplexe, à fuir en hâte, persécuté par cette furtive poursuite. Quoi qu’il en soit, la créature n’avait pas le courage de m’attaquer ou bien elle attendait le moment de me prendre à mon désavantage. Tout en avançant, je restais soigneusement à découvert, me tournant parfois pour écouter, et, de nouveau, je finis par me persuader que mon ennemi avait abandonné la chasse ou qu’il n’était qu’une simple hallucination de mon esprit désordonné. J’entendis le bruit des vagues. Je hâtai le pas, courant presque, et immédiatement je perçus que, derrière moi, quelqu’un, trébuchait.

Je me retournai vivement, tâchant de discerner quelque chose entre les arbres indistincts. Une ombre noire parut bondir dans une autre direction. J’écoutai, immobile, sans rien entendre que l’afflux du sang dans mes oreilles. Je crus que mes nerfs étaient détraqués et que mon imagination me jouait des tours. Je me remis résolument en marche vers le bruit de la mer.

Les arbres s’espacèrent, et, deux ou trois minutes après, je débouchai sur un promontoire bas et dénudé qui s’avançait dans les eaux sombres. La nuit était calme et claire et les reflets de la multitude crois-