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Les noms du général, des officiers de son état-major, tant français qu’helvétiens, qui ont donné l’exemple d’une telle audace, sont déjà gravés sur le roc qui leur avait refusé le passage. Ils trouveront là, sans doute, le plus beau temple de mémoire ; mais ils y ont trouvé de plus cette force d’élan qui leur a fait ensuite renverser, surprendre les postes autrichiens avec tant de bonheur ; ceux-ci dormaient, pour ainsi dire, appuyés sur cette barrière. Avec quelle stupeur ils ont vu arriver les Français sur leur front, sur leur flanc, et descendre le Simplon, lorsqu’ils les croyaient loin de pouvoir même le gravir !

Il est tems aussi de développer les avantages réels que présente pour les opérations militaires la montagne du Simplon, tout horrible qu’elle est, quand on la compare impartialement et judicieusement, soit au Gothard, soit aux deux Bernards. Elle est d’abord notablement moins haute que chacune de ces trois montagnes[1] son élévation semble s’arrêter juste au point qui commence à compromettre la sensibilité humaine, et tandis que les autres font ressentir en tout tems un froid insupportable, le Simplon commence à vous offrir les moyens de redescendre, lorsque l’ascension cesserait de vous donner du ton, lorsqu’elle ne vous ferait plus sentir que ce froid, l’ennemi ou plutôt la mort tant du moral que du physique. Le point des Alpes qu’occupe le Simplon, est aussi bien plus central, soit par rapport à la capitale de la république Italienne, soit par rapport à celle de la république Helvétique, soit à l’égard de Paris

  1. La hauteur comparée de ces quatre montagnes est, d’après le voyage de Mr. de Saussure dans les Alpes : Petit St. Bernard 1125 toises au-dessus de la mer, grand St. Bernard 1246 toises, St. Gothard 1065 toises, Simplon 1029 toises.