Page:Weustenraad - Poésies lyriques, 1848.djvu/26

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Le lest s’était enfui sous son œil alarmé ;
Son lugubre voyage au fond de déserts mornes,
Avait cru du Possible avoir atteint les bornes ;
Pour lui tout était consommé.

Pardonnez-lui, Seigneur ! Il était de ces hommes
Dont l’instinct courageux, le coup d’œil pénétrant
Découvrent, mais trop tôt, du grand siècle où nous sommes
L’incommensurable néant ;
Hommes trop près du ciel, esprits pour qui le monde
Se corrompt de bonne heure, et n’a plus que du fiel,
Dès que leur langue plonge au fond du vase immonde
Dont les bords seuls offrent du miel ;

De ces hommes marqués du sceau du fatalisme,
Qui, même à leur insu, trop tôt émancipés
Par la douleur, hélas ! ou par le scepticisme
Dont, à leurs premiers pas, ils ont été frappés,
Ont des rides au cœur, et des rides nombreuses,
Même avant que nos yeux en trouvent à leur front,
Et sentent s’échapper leurs âmes généreuses,
Quand leurs rêves s’en vont.

Il portait dans l’âme inquiète
L’auguste fierté du poëte
Qui sur la pourpre et l’or dédaigne de s’asseoir,
Revêt des pèlerins les austères cilices,
Erre, en rêvant de nobles sacrifices,