Page:Weustenraad - Poésies lyriques, 1848.djvu/42

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Te voilà donc vouée au destin des esclaves,
Sur un autel sanglant offerte par la Paix,
En expiation des exploits de nos braves,
À la brutalité du sabre hollandais,
Toi dont la voix gardienne éveilla notre audace
Au bruit des premiers coups d’un monarque irrité,
Toi dont le poing vengeur lui brisa sur la face
Le masque de la liberté !

Mais, va, console-toi, console-toi, ma mère,
Tu n’as pas à rougir de ton abaissement,
Tu n’as jamais formé d alliance adultère,
Ni trahi la foi du serment ;
Tu peux de l’étranger braver la calomnie,
Le regarder en face et dire avec bonheur,
Comme le roi français prisonnier à Pavie :
Tout est perdu fors l’honneur !

Non, le stigmate empreint sur ton iront, ma patrie,
N’a point communiqué la gangrène à tes flancs ;
Le stupide bâillon dont ta lèvre est meurtrie,
En étouffant ta voix n’a point brisé tes dents ;
D’un anévrisme impur l’atteinte délétère
N’a pas fait éclater les fibres de ton cœur,
Et ce n’est qu’une veine et non pas une artère
Que perça le fer du vainqueur !