Page:Wharton - Les Metteurs en scène, 1909.djvu/144

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horreur : qu’il insistât trop ou trop peu. Dans un cas pareil le sens des proportions même le plus fin pouvait se trouver en défaut : combien facilement il pouvait commettre cette erreur de prendre sa résistance, à elle, pour une épreuve de sa sincérité, à lui ! De quelque côté qu’elle se tournât, elle se heurtait à l’ironie des circonstances : elle avait le sentiment exaspéré de s’être prise au piège de quelque mauvaise plaisanterie.

Au fond de toutes ces préoccupations, il y avait la crainte de ce que Gannett pouvait penser. Tôt ou tard, naturellement, il faudrait qu’il parlât ; mais qu’il pût penser, un moment, que ses paroles auraient le moindre effet, Lydia, en attendant, trouvait cela simplement insupportable. Sa sensibilité, à ce propos, s’aggravait d’une autre crainte à peine consciente jusque-là : celle d’entraver involontairement la liberté de Gannett. Le regarder comme l’instrument de sa libération, résister en elle-même à toute velléité de mainmise conjugale sur son avenir, à lui, — elle avait jugé que tel était le seul moyen de maintenir la dignité de leurs relations. Ses idées n’avaient pas changé ; mais elle se sentait de plus en plus incapable de fixer son esprit sur le point essentiel : la rupture avec Gannett. Sans doute, il était facile de l’admettre, tant