Page:Wharton - Les Metteurs en scène, 1909.djvu/69

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Waythorn s’en voulait de cette remarque mesquine de sa part, mais ce détail de la cravate s’imposait à lui comme une clef qui lui ouvrait la porte sur le passé d’Alice. Il la voyait Mrs Haskett, assise dans le « front parlour » bourgeois, avec son meuble de peluche, son piano et un exemplaire de « Ben-Hur » sur la table du milieu. Il se la figurait partant pour le théâtre avec Haskett, ou peut-être même à un « church sociable » : elle, avec un grand chapeau à plumes, Haskett en redingote fripée, et au cou le nœud tout fait monté sur élastique. Au retour, il les voyait s’arrêter devant les magasins brillamment éclairés, ou s’attardant aux photographies des actrices en vogue de New-York. Le dimanche après-midi, Haskett devait emmener sa femme se promener, en poussant devant lui la voiture laquée de l’enfant, et Waythorn se représentait les gens avec lesquels ils devaient flâner et causer. Il se figurait Alice, toujours jolie dans sa robe adroitement confectionnée d’après un journal de modes de New-York, mais irritée contre son existence mesquine, regardant les autres femmes avec mépris, et se sentant faite pour une situation sociale toute différente.

Ce qui le frappait, surtout, c’était la manière dont elle s’y était prise pour dissimuler cette période de sa vie passée avec Haskett. Il lui