Page:Wharton - Sous la neige, 1923.djvu/184

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encore une fois. Cet appel familier et triste, et toutes les images confuses qu’il évoquait, remplirent la pensée d’Ethan durant la première partie du trajet. À mi-chemin, la route se creusait, puis il y eut une montée, suivie d’une longue descente vertigineuse. Comme ils prenaient leur élan pour cette deuxième descente, il sembla à Ethan qu’ils volaient véritablement, qu’il volaient très haut dans la nuit nuageuse, avec Starkfield bien loin au-dessous d’eux, perdu dans l’espace comme un point imperceptible. Puis le gros orme suivit, comme s’il les guettait au tournant… Frome marmotta entre ses dents :

— Nous l’atteindrons, je suis sûr que nous l’atteindrons…

Au moment où ils s’approchaient de l’arbre, Mattie resserra ses bras et Ethan eut l’impression que leurs deux sangs se confondaient. Une ou deux fois, la luge broncha quelque peu. Mais il s’inclina de côté de façon à la diriger droit sur l’arbre, et il se répétait sans cesse : « Je suis sûr que nous l’atteindrons. »

Des petites phrases que Mattie avait prononcées lui traversaient l’esprit, et paraissaient flotter dans l’air devant lui…

L’arbre se rapprochait, plus grand et plus menaçant… Comme ils piquaient sur lui, Ethan se dit : « Il nous attend… On dirait qu’il sait… »