Page:Whitman - Feuilles d’herbe, trad. Bazalgette.djvu/659

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CHANTS D ADIEU 275 Absorbe-les bien, ô ma terre, s’ écriait-elle, je t ’ adjure de ne pas laisser perdre mes fils, perdre un atome, Et vous, cours d ’eau, absorbez-les bien en recevant leur sang cher, Et vous, coins du pays, et vous, airs qui planez au-dessus, légers, impalpables, E t vous toutes, essences du sol et des plantes, et vous, pro­ fondeurs de mes fleuves, E t vous, flancs des montagnes, et les forêts que le sang de mes chers enfants a rougies en coulant, E t vous, arbres, jusqu’au fond de vos racines pour léguèr à tous les arbres futurs, Absorbez mes morts, Midi ou Nord — absorbez les corps de ihes jeunes hommes et leur précieux, précieux sang, Gardez-les en dépôt pour moi et rendez-les moi fidèlement après bien des années, Dans l’ essence invisible et l’ odeur de la terre et l’herbe, après des siècles, Dans les airs qui souffleront des campagnes, rendez-moi mes chers petits, rendez mes héros immortels, Rendez-les moi comme une exhalaison après des siècles, leur souffle dans votre souffle, n’ en laissez perdre un atome, O années et tombes ! ô air et sol ! ô mes morts, suave arôme ! Exhale-les à jamais, douce mort, après des années, des siècles.

CAMPS VERDOYANTS Point ces camps seuls aux tentes blanches,mes vieux cama • rades de guerre, Où, désignés pour marcher, après une longue étape,