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ESCALADES DANS LES ALPES.

figures 2 et 3) s’appellent des lee-sides (mot à mot côtés sous le vent). Les lee-sides fournissent souvent d’utiles indications sur les directions qu’ont suivies les glaciers qui n’existent plus.

§ 8. Si les glaciers continuent d’agir sur les roches moutonnées, les effets qu’ils produisent ne sont qu’une extension de ceux qui ont été décrits au paragraphe 7. Les points les plus élevés des rochers sont de plus en plus polis, tandis que les côtés des dépressions échappent entièrement ou en partie à l’action de la glace selon qu’ils sont ou ne sont pas opposés à la direction du mouvement du glacier. Les éminences sont entièrement enlevées dans un certain laps de temps, et leurs positions, de même que celles des dépressions, ne sont plus indiquées que par des convexités ou concavités à peine visibles (figure 4). Ces dernières peuvent à la fin disparaître et de vastes superficies de rochers se trouver réduites à l’état de surfaces planes.

De telles surfaces sont communes au Groënland dans le voisinage immédiat ou au-dessous des glaciers actuels. Je propose de les appeler roches nivelées pour les distinguer des roches moutonnées[1].

§ 9. Le passage des glaciers sur les rochers y produit souvent des stries (voir la gravure de la page 151). Ces rayures sont faites par des corps étrangers fixés dans les couches inférieures des glaciers ou roulant et glissant entre la glace et les rochers. Ces corps étrangers sont des fragments de rochers tombés des parois supérieures ou enlevés par le glacier lui-même au lit rocheux sur lequel il repose.

En général, les stries sont communes sur les roches qui

  1. C’est de Saussure qui a employé le premier l’expression de roches moutonnées, et, dans le paragraphe 1061 de ses Voyages dans les Alpes, il en a donné l’explication suivante : Plus loin, derrière le village de Juviana ou Envionne, on voit des rochers dans la forme que j’appelle moutonnée. Les montagnes auxquelles j’applique cette expression se composent d’un groupe de têtes arrondies… Ces rondeurs contiguës et fréquentes donnent comme ensemble l’impression d’une toison bien fournie ou de l’une de ces perruques qu’on appelle moutonnées.