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Page:Whymper - Escalades dans les Alpes.djvu/166

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ESCALADES DANS LES ALPES.

admettant que les faits constatés dans ce vieux manuscrit aient été exagérés, on doit reconnaître que les effets produits sur les rochers par un glacier dont le mouvement est rapide sont identiques à ceux que produit dans une longue série d’années un mouvement ordinaire.

3o Ces résultats ne doivent pas sembler surprenants quand on se rappelle que les glaciers exercent toujours leur action en ligne droite, fait prouvé par les traces qu’ils laissent de leur passage, et qui, selon l’observation d’Agassiz, sont toujours plus ou moins rectilignes. Cette disposition, qui leur est propre, combinée avec leur impuissance à agir dans les dépressions (excepté sur une étendue limitée), montre pourquoi, par la destruction de tous les angles ainsi que de toutes les courbes, de vastes surfaces planes se trouvent enfin produites.

Il importe de le remarquer, les roches moutonnées ne peuvent pas avoir été usées à une grande profondeur par les glaciers durant l’époque glaciaire moderne[1].

Le degré d’égalité des roches moutonnées est en raison directe des forces qui les ont polies ; leurs formes d’abord rondes ne deviennent unies et plates que beaucoup plus tard. La rondeur des roches moutonnées démontre qu’elles n’ont pas été beaucoup diminuées par les glaciers, et leurs lee-sides corroborent fortement ce témoignage d’ailleurs incontestable.

4o En effet, à moins qu’il ne puisse être démontré que leur formation est postérieure à la retraite de la glace, même une seule lee-side dans un rocher jadis recouvert par un glacier nous démontre que nous voyons une surface qui a été exposée à l’action de l’atmosphère avant que le glacier eût commencé son œuvre de destruction ; et de nombreuses lee-sides, trouvées l’une après l’autre sur une superficie de quelques mètres carrés, prouvent que la surface entière de cette masse rocheuse a été diminuée par le frottement de la glace, mais d’un petit nombre de mètres.

  1. Les géologues commencent à parler de périodes glaciaires bien plus éloignées que celle à laquelle je fais ici allusion.