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ESCALADES DANS LES ALPES.

ne pouvait se comparer qu’au Cervin pour son apparence inaccessible. Elle avait encore un droit de plus à mon attention : c’était la plus haute montagne de la France[1].

L’année 1862 s’écoula sans que j’eusse pu en tenter l’escalade, et, en 1863, mon congé fut trop court pour que je pusse même y penser ; mais, en 1864, l’entreprise devint possible, et je résolus de rendre le repos à mon esprit en achevant la tâche que j’avais laissée incomplète en 1861.

D’autres touristes, cependant, avaient pendant ce laps de temps dirigé leur attention sur le Dauphiné. En première ligne (1862), je dois citer M. F. F. Tuckett, — le célèbre montagnard, dont le nom est si connu sur toute l’étendue des Alpes, — accompagné des guides Michel Croz, Peter Perrn et Bartolomeo Peyrotte. De grands succès avaient récompensé ses efforts. Mais M. Tuckett s’arrêta devant la Pointe des Écrins, et, découragé par son aspect, il battit en retraite pour aller remporter ailleurs des victoires moins dangereuses.

Son expédition jeta toutefois une certaine lumière sur la question de l’ascension des Écrins. Il désigna la direction dans laquelle une expédition nouvelle avait le plus de chance de réussir ; aussi, M. William Mathews et le Rév. T. G. Bonney, auxquels il communiqua le résultat de ses travaux, suivirent ses indications dans la tentative qu’ils firent pour escalader la Pointe des Écrins, accompagnés des frères Michel et J. B. Croz. Mais tous deux échouèrent, ainsi que je vais le raconter avec plus de détails.

Michel Croz ayant pris part à ces deux expéditions dans le Dauphiné, je pensai naturellement à lui pour guide. M. Mathews, auquel je demandai des renseignements sur son compte, me répondit que c’était « un grand caractère » et conclut en me disant : « Il n’est heureux que quand il se sent à plus de 3000 mètres d’altitude. »

Je sais maintenant ce que voulait dire mon ami. Plus Croz

  1. Note du traducteur. Pas en 1861 toutefois, puisque en 1860 l’annexion de la Savoie nous avait donné le Mont-Blanc.