Page:Whymper - Escalades dans les Alpes.djvu/93

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
85
CHAPITRE IV.

tranchant de l’arête, mais se portant de temps à autre un peu à gauche, — c’est-à-dire sur la face de la montagne. Partis de Zermatt, ils y revinrent passer la nuit. Le manque de temps, les nuages et un vent violent les forcèrent de redescendre. Le point le plus élevé qu’ils eussent atteint était de 3650 mètres environ.

La troisième tentative date de la fin d’août 1860 ; elle fut faite par M. Vaughan Hawkins[1] du côté du Val Tournanche. M. Hawkins a publié dans Vacation Tourists un récit animé de son expédition[2] ; le professeur Tyndall en a parlé à diverses reprises dans les notes nombreuses dont il a enrichi la littérature Alpine. Je vais donc la résumer le plus brièvement possible.

M. Hawkins avait examiné la montagne en 1859 avec le guide J. J. Bennen, et, dans son opinion, c’était par l’arête du sud-ouest[3] que l’on pouvait monter au sommet. Il engagea Jean-Jacques Carrel qui avait fait partie des premières tentatives, et, accompagné de Bennen et du professeur Tyndall qu’il avait invité à prendre part à l’expédition, il essaya d’abord de monter à la brèche située entre le petit pic et le grand[4].

Bennen était un guide dont on commençait à parler en Suisse. Pendant presque toute sa trop courte carrière il resta au service de Wellig, le maître de l’hôtel bâti sur l’Æggischhorn qui le louait aux touristes. Bien que son expérience fût limitée, il avait acquis une bonne réputation ; son livret de certificats que j’ai sous les yeux[5] prouve qu’il fut très-estimé par ceux auxquels il servit de guide. C’était un homme d’un extérieur agréable, aux manières polies et distinguées, adroit et hardi, qui aurait fini

  1. M. Hawkins ignorait les tentatives antérieures, et il parle de la sienne comme si elle eût été la première.
  2. Macmillan, 1861.
  3. Cette arête se voit sur la gauche de la grande gravure qui accompagne ce chapitre ; en étudiant cette gravure, les profils et les cartes, le lecteur pourra se former une idée très-nette des points qui furent atteints dans cette tentative et dans celles qui la suivirent.
  4. Depuis lors, le pic inférieur a reçu le nom de Tête du Lion. La brèche s’appelle maintenant le col du Lion, le glacier qui est à sa base le glacier du Lion, et le couloir qui les relie le couloir du Lion.
  5. Grâce à l’obligeance du propriétaire de ce livret, M. F. F. Tuckett.