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LA PATRICIENNE

La pauvre enfant ! Elle se laissa tomber dans un fauteuil, brisée par l’émotion, et un grand trouble remuant son âme. Dans la salle à manger éclataient des voix d’hommes, parfois des rires sonores…

Les invités venaient de rentrer au salon pour prendre congé de Dougaldine. Pour tous, elle eut un mot aimable. Les politesses mièvres de Max de Rosenwelt n’en finissaient pas : la jeune fille dut lui abandonner la main, qu’il porta à ses lèvres. Le docteur Almeneur passa le dernier devant elle. D’une voix à peine compréhensible, il lui souhaita une bonne nuit. Elle le regarda franchement. Sa fierté paraissait s’amollir. Son regard n’avait plus la dureté de la première rencontre. Et elle crut lire aussi, dans les yeux de Jean, un tel mélange d’adoration infinie et de tristesse angoissante qu’elle en fut tout émue jusqu’au moment où le sommeil lui ferma les paupières…

Durant les quinze jours qui suivirent cette soirée, aucun incident notable ne se produisit dans l’existence de nos divers personnages. Comme précédemment, le docteur arrivait de bonne heure pour donner ses leçons. Amédée s’attachait de plus en plus à son maître, il ne cessait d’en parler à sa sœur. Parfois, ils sortaient ensemble et faisaient une promenade dans les environs, pendant laquelle le précepteur expliquait à son élève les merveilles contenues dans l’inimitable livre de la nature. Jean et Dougaldine ne se rencontrèrent jamais.