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L’OREILLE

une percée : la fenêtre ovale. Transmises par la chaine des osselets, les vibrations du tympan atteignent la dernière (la cavité labyrinthique), et c’est alors que se mettent à frémir certaines cordes de la harpe et que, grâce aux ramifications mystérieuses, le cerveau est affecté. C’est alors que nous entendons.

Pourquoi certaines cordes plutôt que d’autres ? Comment établir la correspondance entre certaines formes de vibrations, — nous verrons que le timbre dépend de cette forme, — et telles ou telles cordes ? Quel est le rapport entre nos sensations auditives et les moyens que nous donne la nature de les enregistrer ? Or, c’est plus de trois mille cordes que celle-ci met à notre disposition, alors que l’oreille la plus exercée ne perçoit pas au delà de neuf octaves, que l’ensemble des timbres de la voix et des instruments ne dépasse guère la centaine, que les bruits de tout genre n’en dépassent pas plus d’un millier. À quoi peuvent servir les cordes inutilisées ? Sont-elles en réserve pour une humanité plus affinée, des perceptions plus subtiles, pour des gammes nouvelles, de plus étroites divisions de l’octave, des seizièmes, des trente-deuxièmes de ton ? D’éminents physiologistes le croient… Seuls le fonctionnement de l’organe, la vue du marteau sur l’enclume, du balancement de l’étrier, de l’agitation de la harpe enchantée, seule l’expérience in anima vili pourrait nous répondre, mais le moyen de la tenter ?