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ÂME BLANCHE

à son indifférence, devenait de plus en plus tapageuse, elle me prit sur le bras, se dirigea tranquillement vers l’escalier qui était au fond du vestibule et, malgré sa claudication, malgré la défense que je lui opposais, tout mon corps agité de mouvements convulsifs, en gravit trois marches sans faiblir. Mes cris étaient devenus des hurlements ; je donnais des pieds et des mains, au hasard, dans les côtes, la poitrine, les reins de la vieille fille, poussée par une subite révolte de sauvage, et je continuais à répéter :

— Dauka, Dauka…, je veux Dauka !

Ma tante Josine qui, tout de même, n’avançait guère, finit par me dire, sans s’émouvoir pourtant :

— Si vous vous obstinez à crier comme cela, vous allez réveiller votre grand-papa qui fait sa sieste.

Elle avait imprimé à ce mot « votre grand-papa » le ton spécial, plein de componction, qu’adoptent les dévots en parlant du bon Dieu, et cet excessif respect m’impressionna, tout d’abord ; mais mon chagrin renaissant de ma défaite, de la certitude où j’étais, à présent, de ne pouvoir plus m’échapper, je recommençai mes plaintes avec rage.

Nous étions parvenues à l’entresol, devant une porte où un rideau de percale verte se fronçait sur une vitre ; et, soudain, cette porte, en s’ouvrant, livra passage à un vieillard