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III


Chez les Veydt, les dames de la famille mangeaient dans la cuisine avec la domestique, selon l’ancienne coutume flamande. Mon grand-père prenait ses repas seul, dans une petite salle attenante à son cabinet de travail, à d’autres heures… ; et les mets délicats qu’on lui servait n’avaient aucun rapport avec ceux dont les femmes de la maison devaient se contenter.

On accédait à cette cuisine souterraine par un escalier de pierre taillé dans la muraille et qui sentait le moisi. Dès le seuil, je distinguai, éclairés pauvrement par une lampe à godets : le dallage en carreaux rouges semé de sable blanc ; les dressoirs chargés de poteries à fleurages ; les casseroles en cuivre accrochées au long des murailles. Dans le tiroir de la cuisinière, de grosses cendres tombaient une à une, flamboyantes, et le balancier de l’horloge, allant d’un mouvement régulier, avait l’éclat de l’or neuf.

Ma grand’mère, une petite femme maigre, active, pétulante, vêtue d’un deuil râpé, avec, sur ses grêles épaules, la pèlerine à effilé de soie