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ÂME BLANCHE

Elle s’était mise à ranger des bouquets qui levaient leurs roses blanches, sur le marbre de sa commode, en deux grands vases placés sous le portrait, de chaque côté ; et, intéressée par ce soin qu’elle prenait avec tant de dévotion et qui me la rendait sympathique, je me coulai près d’elle, moins farouche, je demandai :

— C’est pour papa, ces fleurs ?

Elle répliqua :

— Et pour qui serait-ce ?

Seulement, une larme avait roulé sur sa joue, et elle s’attendrit au point de s’écrier en me prenant la main :

— Ah ! ma pauvre, pauvre enfant !

Alors, à mon tour, je serrai sa main et, pour la première fois depuis mon départ de la place du Béguinage, je me laissai aller à pleurer. Je pleurai tant, et d’un tel cœur, et durant si longtemps que j’en étais comme suffoquée.

Heureusement, ma tante eut une inspiration divine ou, plutôt, simplement, maternelle : elle alla chercher au fond de la malle à moitié vidée, Mlle Zoone, ma poupée, et elle me la mit dans les bras. Cette présence d’une vieille chose qui, toujours, m’avait distraite, avec laquelle j’avais joué et que j’aimais passionnément, me calma un peu. Je consentis à me laisser enlever ma coiffure, baigner les yeux, laver les mains… et quand nous descendîmes pour le souper, j’étais sinon résignée, au moins très convenable.