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ÂME BLANCHE

Les lampes-carcel préparées et le couvert mis, on fermait la porte de la salle à manger pour jusqu’à l’heure où il s’agirait d’y faire de la lumière, de placer sur cette table, déjà chargée de plats et de vases, les substances destinées à la partie alimentaire de « la soirée ». Le détail n’en variait jamais : deux langues de bœuf à l’écarlate, comme pièces de résistance ; deux assiettes de biscuits anglais, deux de mendiants, des gaufres, chef-d’œuvre de Wantje, et une pile de tartines, minces comme des feuilles de papier, pour accompagner la charcuterie. Les convives se rattrapaient sur les vins, qui étaient incomparables et distribués généreusement par l’amphitryon, malgré le crève-cœur qu’en éprouvait sa femme.

La parenté réunie se présentait rue Marcq à neuf heures précises; elle y restait jusqu’à minuit, afin de pouvoir souhaiter la bonne année à Monsieur, Madame et Mademoiselle Veydt. Or, malgré la préméditation de tous ces lents et minutieux arrangements, ces dames semblaient, chaque fois, prises à l’improviste par la visite annuelle et nombreuse : elles jouaient l’étonnement, allaient jusqu’à s’écrier :

— Comment, c’est ce soir la veille de l’an ! Et vous venez nous faire vos souhaits ? C’est bien aimable. Mais entrez donc ; donnez-vous la peine de vous asseoir !

Les autres répondaient :