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ÂME BLANCHE

V

Le mot vénérable s’appliquait à la personne physique de M. Veydt absolument comme s’il eût été créé exprès pour la désigner. C’est celui, qui venait aux lèvres de chacun quand ce vieillard apparaissait. Sa belle tête, sa noble prestance, ses cheveux blancs soyeux et bouclés, ses yeux bleus d’une profondeur suave, sa parole onctueuse, d’un timbre séduisant, appelaient l’estime, inspiraient confiance. On se donnait à lui dès la première rencontre et ceux qu’il avait une fois conquis ne se reprenaient plus, demeuraient à jamais ses féaux, non pas, précisément, pour ce qu’il avait fait, mais pour ce qu’il leur semblait qu’il était capable de faire. Une sorte d’auréole le divinisait dont la pure lumière devait avoir bien du prestige car ce charme, exercé par lui sur les siens, les étrangers le subissaient aussi : ses malades l’aimaient comme un père et, dans les rues où il passait, les mendiants, — à qui, pourtant, il ne donnait jamais un liard, — se découvraient devant lui comme au passage du saint-Viatique.