Page:Wilde - Derniers essais de littérature et d’esthétique, 1913.djvu/115

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Ce que nous avons de mieux à faire, c’est d’oublier ces sottes rêveries et de lire Tévérino et le Secrétaire intime.

Pauvre M. Caro ! Cet esprit qu’il traite avec ce détachement, cette désinvolture, c’est le levain même de la vie moderne.

Il remet le monde au moule pour nous. Il façonne à nouveau notre époque.

S’il est antédiluvien, c’est parce que le déluge n’est pas encore venu ; s’il est utopique, il faut ajouter Utopie à nos géographies.

A quels curieux expédients M. Caro en est réduit par la violence de ses préjugés, on pourra s’en rendre compte en le voyant s’évertuer à classer les romans de George Sand avec les vieilles Chansons de Geste, les récits d’aventures qui caractérisent une littérature primitive, alors qu’en employant la fiction comme véhicule, le roman comme moyen d’agir sur les idéals sociaux de son siècle, George Sand ne faisait que continuer les traditions de Voltaire et de Rousseau, de Diderot et de Chateaubriand.

Le roman, dit M. Caro, doit s’allier soit à la poésie, soit à la science. Qu’il ait trouvé dans la philosophie un de ses alliés les plus vigoureux, c’est une idée que ne paraît pas s’être présentée à lui.

Une telle façon de voir pourrait peut-être s’excuser chez un critique anglais.

Nos plus grands romanciers, tels que Fielding, Scott et Thackeray se préoccupent fort peu de la philosophie de leur siècle. Mais, venant d’un critique français, cette assertion semble déceler une étrange