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Page:Wilde - Poèmes, trad. Savine, 1907.djvu/104

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de neige, ou bien est restauré par des mains plus

 meurtrières encore. La pire dégradation qu'opère le
 Temps; il la voile de quelque grâce, mais ces modernes
 scandales ne savent faire qu'une nudité imperméable
 à la pluie.
 Où est-il cet Art qui invitait des Anges à venir
 chanter sous les hautes voûtes du choeur à Lincoln.
 Si bien que l'air semble emprunter à de telles harmonies
 de marbre une douceur que des lèvres humaines
 n'espèrent point tirer du vrai roseau? Ah!
 où est-elle cette main habile qui sut fléchir les
 branches fleuries de l'aubépine,
 pour l'arche de Southwell, et sculpta la maison
 de Celui qui aimait les champs avec toutes nos plus
 charmantes fleurs anglaises? Le même soleil se
 lève pour nous; les saisons naturelles tissent le
 même tapis de vert et de gris; les collines ont
 gardé parmi nous leur aspect, mais cet Esprit-là a
 disparu.
 Et peut-être vaut-il mieux qu'il en soit ainsi.
 Car la Tyrannie est une Reine incestueuse, elle a
 pour frère et comme pour compagnon de lit le
 Meurtre, et la Peste habite avec elle; ses pas perfides
 vont et viennent par des sentiers impurs et
 sanglants. Mieux valent un désert vide et une âme
 inviolée.
 Car une noble fraternité, l'harmonie de la vie