Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/112

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l’on pense tout le temps qu’elle ne sait pas bien de quoi il est question, tragédie devenue incompréhensible pour elle et ses auditeurs. Pensez-y, si vous pouvez, et pensez combien glorieuse la vie est devenue !

— Vraiment, dis-je, il m’est difficile d’y penser.

J’étais assis à regarder l’éclat de ses yeux et comme la nouvelle vie semblait briller dans sa figure, et j’admirais qu’à son âge il pût penser au bonheur du monde, ou seulement à autre chose qu’à son prochain dîner.

— Dites-moi en détail, dis-je, ce qu’il y a maintenant à l’est de Bloomsbury ?

— Il n’y a que peu de maisons entre ici et les limites de l’ancienne cité ; mais dans la cité nous avons une population dense. Nos ancêtres, au premier défrichement des bouges, ne se sont pas hâtés d’abattre les maisons dans ce qu’on appelait, à la fin du dix-neuvième siècle, le quartier des affaires de la ville, et ce qui plus tard fut connu sous le nom d’Escroc-ville. Vous comprenez, ces maisons, bien qu’elles fussent hideusement serrées sur le sol, étaient grandes, solidement construites et propres, parce qu’on ne s’en servait pas pour y vivre, mais uniquement comme maisons de jeu ; en sorte que les pauvres gens des bouges défrichés les prirent comme logement, et habitèrent là jusqu’au moment où les hommes de ces temps-là eurent le temps de penser à quelque chose de mieux pour eux ; les constructions furent donc abattues si progressivement, que les gens se sont