Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/129

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possible de plaisanter ces absurdités, un pareil gouvernement est-il possible ?

Moi. — Il est impossible.

H. — Oui, heureusement. Mais pour quel autre objet que la protection des riches contre les pauvres, des forts contre les faibles, ce gouvernement existait-il ?

Moi. — J’ai entendu dire que l’on affirmait que son rôle était de défendre les citoyens contre les attaques d’autres pays.

H. — On l’a affirmé ; mais pouvait-on s’attendre à ce que personne le crût ? Par exemple, le gouvernement anglais a-t-il défendu le citoyen anglais contre le gouvernement français ?

Moi. — C’est ce que l’on disait.

H. — Alors, si les Français avaient envahi l’Angleterre et l’avaient conquise, ils n’auraient pas permis aux ouvriers anglais de bien vivre ?

Moi, riant. — Autant que je puis en juger, les maîtres anglais des ouvriers anglais se chargeaient de cela : ils prenaient à leurs ouvriers le plus qu’ils osaient de leur subsistance, à leur propre profit.

H. — Mais si les Français avaient conquis, n’auraient-ils pas pris encore plus aux ouvriers anglais ?

Moi. — Je ne crois pas ; car, dans ce cas, les ouvriers anglais seraient morts de faim ; et alors la conquête française aurait ruiné les Français, tout comme si les chevaux et le bétail anglais avaient péri par insuffisance de nourriture. En sorte qu’après tout, les ouvriers anglais n’auraient pas autrement pâti de la conquête : leurs