Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/173

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changement, la « révolution », comme on l’appelait, s’est-il produit pacifiquement ?

— Pacifiquement ? Quelle paix y avait-il parmi la masse confuse de ces pauvres malheureux du dix-neuvième siècle ? C’était la guerre d’un bout à l’autre : guerre âpre, jusqu’au moment où l’espoir et la joie y mirent fin.

— Voulez-vous dire des combats effectifs avec des armes, ou bien des grèves et des lockouts, et la famine dont nous avons entendu parler ?

— Les deux, les deux. En somme, l’histoire de la terrible période de transition entre l’esclavage commercial et la liberté peut être résumée ainsi. Lorsque surgit l’espoir de réaliser pour tous les hommes une condition de vie communiste, le pouvoir des classes moyennes, qui dominaient alors la société, était si énorme et écrasant que presque à tous cela paraissait un rêve, — : même à ceux qui avaient, pour ainsi dire malgré eux en dépit de leur raison et de leur jugement, conçu ces espérances. Ceci était d’autant plus vrai que plusieurs de ces hommes, plus éclairés, que l’on appelait alors socialistes, quoiqu’ils sussent bien, et même affirmassent publiquement, que la seule condition sociale raisonnable est le communisme pur, tel que vous le voyez maintenant autour de vous, reculaient cependant devant ce qui leur paraissait la tâche stérile de prêcher la réalisation d’un heureux rêve. En regardant en arrière, maintenant, nous pouvons voir que la grande cause efficiente du changement était une aspi-