Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/194

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de l’inauguration d’une époque de démocratie raisonnable, délivrée des manies tyranniques du socialisme.

La seconde exception fut un journal qui passait pour l’un des plus violents adversaires de la démocratie, et avec raison ; mais le directeur eut du courage : il parla en son nom, et pas au nom du journal. En quelques mots simples, indignés, il demanda ce que valait une société que l’on devait défendre par le massacre de citoyens désarmés, et somma le gouvernement de supprimer l’état de siège et de faire passer le général et ses officiers qui avaient tiré sur le peuple en jugement pour assassinat. Il alla plus loin et déclara, quelles que fussent ses opinions quant aux doctrines des socialistes, que, pour sa part, il ferait sienne la cause du peuple, jusqu’à ce que le gouvernement eût expié son atrocité en montrant qu’il était prêt à écouter les réclamations d’hommes qui savaient ce qu’ils voulaient, et que la société décrépite obligeait à faire valoir ces réclamations par n’importe quel moyen.

Naturellement, ce directeur fut aussitôt arrêté par le pouvoir militaire ; mais son article audacieux était déjà entre les mains du public, et il produisit grand effet : si grand que le gouvernement, après quelque hésitation, retira l’état de siège ; mais en même temps il renforça l’organisation militaire, qu’il rendit plus rigoureuse. Trois membres du Comité de Salut public avaient été tués à Trafalgar-Square : la plupart des autres retournèrent à leur lieu de