Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/312

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Elle s’arrêta, et parut pensive un instant, puis elle dit en souriant :

— Je dois dire que je n’aime pas me déplacer d’une maison à l’autre ; on s’habitue si agréablement à tout le détail de la vie autour de soi ; tout s’harmonise si heureusement avec notre propre vie, qu’un recommencement est une sorte de souffrance. Mais je crois que dans le pays d’où vous venez, vous trouveriez cela mesquin et peu hardi, et me jugeriez mal pour cela.

Elle dit cela avec un sourire caressant, et je me hâtai de répondre :

— Non, certes ; vous faites encore écho à mes propres pensées. Je ne m’attendais guère à vous entendre parler ainsi. Je croyais, d’après tout ce que j’ai entendu, qu’on changeait beaucoup de résidence parmi vous dans ce pays.

— Oh ! dit-elle, naturellement on est libre de se déplacer ; mais, sauf pour des parties de plaisir, surtout à la moisson et à la fenaison, comme maintenant, je ne pense pas qu’on le fasse beaucoup. Peut-être aussi ai-je d’autres goûts moins casaniers, comme je l’indiquais tout à l’heure, et j’aimerais parcourir avec vous tout le pays de l’ouest… sans penser à rien, conclut-elle en souriant.

— J’aurais beaucoup à penser, dis-je.