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Page:Wilson - L'appel du Chibougamau, 1956.djvu/157

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LE VIEUX MOULIN

(qui avait agi, du reste, strictement selon la loi et s’en était tiré avec un profit de 800,000 $) s’acheta un habit de soirée et se paya une croisière de luxe autour du monde. Ce fut le sommet de sa carrière car, ainsi qu’il le disait plus tard orgueilleusement : « J’ai mangé à la table du capitaine ».

Probablement le plus malhonnête de tous les promoteurs canadiens est un individu connu au Chibougamau sous le sobriquet d’« Un joli monsieur ». Il a su atteindre le fond de l’ingratitude et de la bassesse.

Lorsque les Canadiens français donnent cérémonieusement le titre de « joli monsieur » à quelqu’un, c’est une insulte de choix qu’ils lui décochent.

Voilà quelques années, un type de ce calibre passa au Chibougamau. Il était bel homme, parlait avec distinction et il était nanti d’un cerveau de promoteur-racketeer, genre Capone. Il était propriétaire de diverses propriétés minières et, dans les cercles de spéculateurs interlopes, on le tenait en haute estime. Il se préparait à jouer un sale tour, juste au moment — détail singulier — où le Chibougamau venait d’être submergé par une vague de prospérité.

Il avait fait quelque forage — avec l’argent d’un groupe de ses victimes — sur certaines concessions et, par la faute de son comptable constamment ivre, avait omis de rendre compte de ce travail statutaire et de payer ses taxes annuelles au ministère des Mines. Lorsqu’un propriétaire de concessions néglige ces conditions essentielles, les claims deviennent « ouverts » et le premier venu peut les jalonner de nouveau, après avoir obtenu un certificat de mineur, au prix de10 $.

Un prospecteur du Chibougamau, à Québec à ce moment là, apprit que la propriété du « Joli monsieur » serait « ouverte » le lendemain matin.