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VOYAGE AUTOUR DU MONDE

Les journaux d’hier nous apprennent que dans l’entrepôt de la maison Travers & Cie, un de ces aimables reptiles a été trouvé confortablement installé sous les ballots de marchandises. C’est pour le moins un cas de violation de domicile peu agréable. Ce cas est rare, me dit-on ; c’est fort heureux ! Nous prenons le thé sur la pelouse du grand hôtel, le Beach-House.

Je voudrais pouvoir décrire la magique splendeur des forêts de palmiers et de bananiers qui couvrent l’île. On dirait un immense édredon de gigantesques plumes d’autruches, d’un vert tendre, qui se balancent au souffle d’une brise douce et parfumée. Sous l’averse chaude, ces plumes ruissellent de perles transparentes comme les gouttes de la rosée du matin.

Dans l’immensité bleue de l’océan, dont les flots rafraîchissants baignent, en cadence, les sables du rivage, le soleil prend son bain du soir. Les palmiers, fatigués de ses rayons brûlants, redressent, sous la fraîcheur de la brise, leur chevelure abattue, et se profilent comme les mâts de milliers de carènes au repos dans un port hospitalier. Du large, les pêcheurs reviennent en chantant ; d’une barque qui glisse sous les palmiers penchés sur le sable d’or de la plage, s’élève dans l’air, légère comme le vol du bengali, chantée par des voix jeunes et fraîches, cadencée par la rame, la tendre et délicieuse barcarolle :


« La brise, mollement,
« Mignonne, enfle nos voiles ;
« Partout, au firmament,
« Scintillent les étoiles.
« Ta voix sait me charmer,
« Ton doux regard m’enivre,
« Oh ! qu’il fait bon de vivre !
« Oh ! qu’il est doux d’aimer ! »


Il y a des moments où la vie vaut la peine d’être vécue. Déposons une boule blanche dans l’urne des jours.