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maharajah, Malina et Oualida, les deux sœurs, seize et dix-huit ans, nées de parents inconnus, ( « Too many fathers » , me dit le guide) ont exécuté les danses du paon, du cerf-volant et du serpent, menuets que nous avions déjà vus à Delhi. Cette fois, l’exécution est supérieure ; ce sont des artistes. Ne vous attendez pas à voir du déshabillé, vous serez déçus. Dans les pays où la population vit à peu près nue, le grand chic consiste à s’habiller jusque par-dessus la tête… Et nos danseuses étaient chic, trop chic ; la grâce de leurs mouvements y perdait. Elles ont aussi chanté. J’ai encore à l’oreille le refrain :


« Iacatori mah rimeh. »


Cela se traduit :


« D’un glaive, tu perces mon cœur. »


Le percement des oreilles par la musique aiguë qui accompagne cette ballade sentimentale ne laisse aucun doute sur la parfaite harmonie entre les paroles et la musique. La danse finie, nos deux belles au teint bruni se sont laissé choir sur le tapis, dans leurs jupes en éventail. Nous avons causé. L’aînée avait vu Agra, la grande ville voisine ; la cadette n’est pas encore sortie de Jeypour. Les noms d’Europe, Amérique, France, Canada, leur sont tout à fait inconnus. Nous leur demandons si elles aimeraient à voir ces grands pays. « Pourquoi voyager ? Après le Paradis, c’est Jeypour, » fut la réponse concluante. Un insolent demanda à l’une d’elles, la plus jeune, si elle pensait à se marier. « C’te question ! Je me marie tous les jours ». — Je garantis l’authenticité de la réplique et je la rapporte dans toute sa saveur.

Le maharajah a trois femmes légitimes, cinq cents concubines et soixante eunuques pour en prendre soin. Il est âgé de soixante-deux ans ; il se meurt. Comme il n’a pas d’héritier mâle, il a adopté son neveu de douze ans, sur avis de son conseil exécutif. Son palais et ses dépendances