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ASIE — JAPON — YOKOHAMA — TOKIO

Mississipi, ainsi nommée, je crois, depuis l’expédition du commodore Perry qui, en 1853, força la porte de l’Empire du Soleil Levant et l’ouvrit au monde extérieur. Avant cette époque, il était fermé, et si bien, qu’il était défendu de construire des navires pouvant aller sur les hautes mers, et que tout sujet nippon, qui sortait de l’île, n’y pouvait plus rentrer, sous peine de mort. Depuis, le Japon a prodigieusement progressé. Il a perdu un peu de ses vieux us et coutumes, mais bien des années s’écouleront avant qu’il ne devienne européen, surtout américain. East is East and West is West; c’est tranché.

Après le lunch, nous nous dirigeons dans la banlieue de Tokio, en réponse à l’aimable invitation à un thé chez le marquis Asano, invitation transmise aux passagers de première du Shinyo par télégraphie sans fil. Trajet de trois quarts d’heure. Le marquis est le président de la compagnie de navigation Toyio Kaishen Kaisha. Il est multimillionnaire, dit-on, et habite un immense château, style pur japonais. Son intendant nous reçoit sous le porche, dont la toiture en tuile, comme du reste celle des divers pavillons de la demeure princière, est pointue au sommet et relevée aux quatre coins ; c’est classique. Nous verrons cette forme particulière de toiture partout sur la terre nippone ; il y en a peu d’autres. Un style différent indique, à de rares exceptions près, un établissement étranger.

Les serviteurs nous invitent à mettre nos pieds chaussés dans des souliers de toile. Il en sera ainsi durant notre séjour dans l’empire. Il n’est pas permis de fouler le parquet des maisons du riche ou du pauvre avec les chaussures qui servent au dehors ; si l’on vous présente des babouches, il vous faut enlever vos chaussures. Les gens du peuple qui, en général, ne portent pas de bas, laissent à la porte leurs chaussures de bois (geta), ailleurs comme chez eux, et entrent pieds nus. Ils ont raison d’agir ainsi : c’est si propre dans leurs demeures. Le plancher est en natte ; les murs, les cloisons et les plafonds sont en bois naturel, ou en papier, ou en toile, ou en soie richement