Page:Wolf - Les Hypothèses cosmogoniques, suivies de la Théorie du ciel de Kant, 1886.djvu/188

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ment dans tous les sens la rotation qui résulte de sa chute, et où, en raison de l’énorme distance, la communication des mouvements inférieurs, qui pourrait établir l’uniformité du sens des révolutions, n’aurait pas le temps d’étendre son influence, avant que la formation de la nature soit complète dans les régions inférieures. Il existe donc peut-être des comètes animées d’un mouvement rétrograde, c’est-à-dire dirigé de l’est à l’ouest ; quoique, par les raisons que je viens de dire, je me laisse aller à affirmer que, des dix-neuf comètes dans lesquelles on a signalé cette particularité, quelques-unes ont bien pu être prises pour telles par une pure illusion d’optique.

J’ai encore quelques remarques à faire sur les masses des comètes et sur la densité de leur substance. Par les raisons exposées dans le Chapitre précédent, dans les hautes régions où se forment ces corps, leur masse devrait croître en même temps que leur distance au Soleil ; et il y a lieu de croire en effet que quelques comètes sont plus grosses que Saturne et Jupiter. Mais il ne faudrait pas non plus s’imaginer que la grandeur des masses doit aller toujours en croissant. La diffusion de la matière, la légèreté spécifique de ses particules, rendent très lente la formation d’un astre dans ces régions reculées du monde planétaire ; l’expansion indéfinie de la matière dans un espace sans limites, l’absence de toute tendance à se concentrer vers une surface déterminée, permet la formation d’un grand nombre de petits corps, bien plutôt que la condensation en une masse unique un peu considérable ; et la faiblesse de la force centrale fait tomber sur le Soleil la plus grande partie de la matière, sans l’avoir rassemblée en masses.

La densité spécifique de la matière dont sont composées les comètes est bien plus étonnante que la grandeur de leur masse. Vraisemblablement, puisqu’elles se forment dans la région la plus élevée du monde planétaire, les particules de leur agrégat sont de l’espèce la plus légère ; et l’on ne peut douter que ce ne soit là la cause principale de l’atmosphère vaporeuse et de la queue par lesquelles elles se distinguent des autres corps célestes. On ne peut en effet attribuer spécialement à l’action de la chaleur solaire cette expansion de la matière cométaire en vapeur. Plusieurs comètes à leur périhélie ne se rapprochent pas plus du Soleil que la Terre elle-même ; beaucoup viennent entre les orbites de Vénus et de la