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succéder au néant. À cette époque, rien n’avait encore pris une forme. La formation de corps célestes isolés… constitue un état postérieur. » (P. 95.)

Pour tirer du chaos primitif cet état postérieur, Kant ne fait intervenir que deux forces, l’attraction newtonienne, et une force répulsive sensible seulement à distance très petite, et qui agit surtout quand la matière est réduite à un état de division extrême. « Dans un espace ainsi rempli, le repos ne dure qu’un instant. Les éléments possèdent par essence les forces qui peuvent les mettre en mouvement et qui deviennent pour eux sources de vie. La matière est par suite en effort constant pour se façonner. Les éléments disséminés d’espèce plus dense attirent à eux toute la matière plus légère qui les environne. Eux-mêmes, avec les matériaux qu’ils ont déjà ramassés, se réunissent dans les points où existent des particules d’espèce plus dense encore, et ainsi de suite… La conséquence de ce travail sera la formation de diverses masses qui, une fois créées, resteraient éternellement en repos, équilibrées par l’égalité de leurs attractions mutuelles. » (P. 97.)

Ces divers amas paraissent destinés à former les étoiles ou centres de premier ordre dans l’univers entier. Kant les déclare immobiles, et en effet, en supposant la matière primitive en repos absolu, il serait impuissant à expliquer comment elles pourraient circuler les unes autour des autres sans se réunir en une masse unique.

Un autre oubli des principes de la Mécanique permet ensuite à Kant de concevoir comment une de ces masses peut se mettre en rotation par elle-même en vertu d’actions intérieures. Dans cette masse primitive à centre plus dense, les particules éloignées tendent à tomber vers le centre ; mais, dans leur chute, elles subissent des déviations latérales par suite des répulsions qu’elles exercent les unes sur les autres. De là des mouvements tourbillonnaires qui se croisent dans tous les sens et sous toutes les inclinaisons. Mais les chocs qui résultent de ces croisements finissent par ne plus laisser subsister que des mouvements circulaires, parallèles et de même sens. Une portion de la matière se trouve ainsi animée d’un mouvement de rotation, dans lequel chaque particule « se maintient à distance constante du centre par l’équilibre de la force centrifuge et de la force de chute ». Mais la plus grande partie de la matière primitive, réduite au repos par les chocs,