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iv
INTRODUCTION

Les études qu’y fit Ad. Wurtz n’eurent rien de particulièrement brillant. Sur la liste des nominations qu’il obtint pendant les huit années qu’il y passa, nous trouvons plusieurs prix d’application, un prix de géographie, un autre de mémoire et d’élocution, puis des accessits d’histoire et de géographie, de version latine, de version grecque, de mathématiques et de versification française. On reconnaît là un élève travaillant avec zèle toutes les branches de ses études, mais ne se distinguant spécialement dans aucune. Aussi n’est-il pas étonnant que son père lui-même, avec son esprit un peu chagrin, lui ait prédit plus d’une fois « qu’il ne deviendrait jamais rien de bien extraordinaire ».

Un cours libre de botanique accompagne d’excursions dans les environs de Strasbourg était ouvert aux élèves des diverses classes. En 1828, Wurtz, alors en sixième, suivit ce cours, qui contribua sans doute à développer chez lui l’esprit d’observation et à lui donner pour l’histoire naturelle un goût qu’il conserva toujours. Déjà pleinement lancé dans ses travaux chimiques, il se plaisait encore à lire les œuvres un peu nuageuses du naturaliste-philosophe Oken.

Comme on voit, les études dans ce temps-là ne manquaient pas de cette variété que quelques-uns trouvent excessive aujourd’hui, oubliant qu’il importe d’offrir, dans les années de la première jeunesse, à l’homme tout entier les occasions nécessaires à son développement, et que plus d’une intelligence s’est atrophiée, ne rencontrant devant elle qu’un chemin étroit qui n’était pas celui qui lui convenait.

Celle de Wurtz, malgré le développement spécial et magnifique qu’il lui donna plus tard dans le sens de ses études de prédilection fut dès l’abord et resta toujours remarquablement ouverte dans toutes les directions : science et littérature, beautés de l’art et de la nature, tout l’attirait et lui procurait des jouissances élevées en le mettant en communion avec les grands esprits qui sont comme les guides de l’humanité vers l’idéal.

La vie de famille complétait d’ailleurs l’œuvre de l’école. Plus que la maison paternelle, un peu assombrie par le caractère et par la situation modeste du père, celle du pasteur Kreiss, l’aïeul maternel, procurait aux enfants Wurtz des distractions saines et des relations utiles. À côté du grand-père, homme respectable et plein de bonté, nous y retrouvons ses deux fils, dont l’un, Théodore, devint pour ses neveux un second père, après la mort de son beau-frère, et les suivit dans leurs études avec un dévouement qui ne se démentit jamais et qui fut largement récompensé par leur affection et par leurs succès.

Les vacances se passaient habituellement au Ban de la Roche, à Rothau, dans l’habitation qu’y possédait une grand’tante. On trouvait là une nombreuse société et, par une tradition qui s’est perpétuée, une vie à la fois joyeuse et patriarcale. Les excursions dans les montagnes et dans les bois environnants, si verts et si pittoresques, fournissaient une récréation attrayante et salutaire ; les usines, filatures, tissage et