Page:Wyzewa - Beethoven et Wagner, 1898.djvu/113

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

FIDELIO I03

« Décidément,medisais-je, c’est un bel ouvrage. Je ne me serais pas attendu à quelque chose d’aussi intéressant de la part de Beethoven, qui était mieux doué pour la musique instrumentale que pour le théâtre. Assurément le sujet est ridicule, et Beethoven a eu grand tort de s’en tenir aussi consciencieusement à la vieille coupe traditionnelle de l’opéra classique. Fidelio n’est ainsi qu’une suite de mélodies, sans rien qui les relie et en forme un ensemble. Jolis duos, quatuors assez lestement enlevés : deux romances qui valent les plus agréables de Mozart. Mais en somme, s’il n’y a là rien de bien nouveau, il n’y a rien non plus qui fatigue ou qui ennuie. J’ai écouté ces mélodies sans trop sentir l’impression de monotonie qui me saisit, à l’ordinaire, lorsque j’entends un opéra. Et puis il y a des détails charmants :

le chœur des prisonniers, par exemple, 

sansétred’un contrepoint bienraffîné, ne manque au demeurant ni de couleur ni d’originalité. Quel malheur que Beethoven n’ait pas faitd’opéra dans ses dernières années, alors qu’il avait secoué toutes les routines, et s’était mis à imiter la manière de Bach ! Ou plutôt, quand on y songe, le malheur n’est peut-être pas si grand ! Les hardiesses de Beethoven, dans sa musique instrumentale, nous séduisent encore : mais qui sait si ses opéras les plus audacieux ne nous sem-