Haydn, ces premières poésies de M. Mallarmé étonnent déjà par la volontaire unité de leur ton musical : développement logique et nécessaire d’un motif, agencement prémédité des syllabes, dans le motif même, afin de produire une émotion totale. En exemple, ces quelques vers :
Dans le Guignon :
Au-dessus du bétail écœurant des humains,
Bondissaient par instant les sauvages crinières
Des mendieurs dazur, perdus dans les chemins.
Dans l’Apparition :
La lune sattristait : des séraphins en pleurs,
Rêvant, l’archet aux doigts, dans le calme des fleurs
Vaporeuses, tiraient de mourantes violes
Des blancs sanglots glissant sur Tazur des corolles.
Dans les Fleurs :
Et tu lis la blancheur sanglotante des lys.
Qui, roulant sur la mer de soupirs qu’elle effleure,
À travers l’encens bleu des horizons pâlis.
Monte rêveusement vers la lune qui pleure !
Que l’on compare ces vers à certaines stances de Hugo, vêtues de rythmes pareils : la différence apparaîtra aussitôt du poète et de l’orateur.
M. Mallarmé a cependant renié, — comme il sied à l’artiste allé plus loin — ces premiers poèmes écrits dans la période — si l’on veut — de sa compréhensibilité. Mais ils n’en restent pas moins les productions parfaites d’un genre dépassé ; précieux surtout parce qu’ils montrent déjà les qua-