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Page:Wyzewa - Nos maîtres, 1895.djvu/257

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QUESTIONS D’ESTHÉTIQUE LITTÉRAIRE

ser une pièce de Shakespeare, une note, au bas de la page, avertit les collégiens que corser est pris ici dans un sens figuré, et signifie rendre consistant. « Supposez, dit encore M. Lemaître, qu’Hamlet soit monté contre Claudius… » Vite une note : « Monté, c’est-à-dire exaspéré ; cette expression appartient à la langue vulgaire. » Les notices, en revanche, sont pour la plupart très sommaires ; mais plusieurs sont écrites avec beaucoup de finesse et d’ingéniosité, et je ne doute pas qu’on n’en reproduise bientôt des extraits, dûment accompagnés de notes et de commentaires, dans un autre recueil de morceaux choisis.

Et puisqu’on entend, maintenant, que les collégiens apprennent dès l’enfance à connaître et à admirer le mouvement littéraire de leur temps, il me paraît excellent qu’à défaut des auteurs classiques. — dont, sans doute, ni professeurs ni élèves ne veulent plus entendre parler, — on leur fasse lire ainsi des pages de M. Taine, de M. France, de M. Brunetière et de M. Lemaître : car. outre que ces messieurs se sont occupés de critique, ce sont encore de grands écrivains, les seuls peut-être qui gardent aujourd’hui parmi nous le goût de la mesure, et de la simplicité, et de la clarté, et de cette propriété d’expressions sans laquelle il n’y a point d’œuvre littéraire qu’on puisse supporter de relire. Chez eux seuls se retrouve ce qui n’a pas à jamais péri des traditions anciennes, en fait de pensées et de style. Trop heureux les collégiens si. à force de les pratiquer, ils pouvaient s’accoutumer à écrire comme eux !