Aller au contenu

Page:Wyzewa - Nos maîtres, 1895.djvu/290

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
278
NOS MAÎTRES

rable docteur en médecine qui vit à Passy, entre de vieux livres compétents. Je lui racontai l’histoire telle que je viens de vous la dire, et je lui demandai franchement son avis.

J’endurai ensuite ses premiers reproches, qui furent très vifs. Il m’accusa de toutes les folies, ou bien d’attenter à son repos par un instinct naturel de mystification.

— Mais votre histoire de grand’mère est absurde ! poursuivit-il.

Et je l’interrompis.

— Absurde, n’est-ce pas ? mais pourquoi ?

— Parce qu’elle est contredite par ta science, et vous le savez bien !

Je ne le savais point, mais j’en avais eu le pressentiment. La science, voilà donc ce qui abolissait les récits de ma vieille nourrice ! Je m’informai anxieusement de ce qu’était la science.

Et j’appris que la science avait pour fm de découvrir les lois des choses ; car les choses ne se produisaient point au hasard, mais suivant un ordre immuable et fixe. Si un fait arrive, il se condamne, par cela seul, à toujours arriver désormais dans les mêmes circonstances. J’appris encore que les hommes avaient longtemps tâtonné dans la découverte de ces lois, et qu’il y avait eu jadis de fausses lois ; mais que les lois actuellement enseignées étaient les vraies lois, celles qui reflétaient l’essence éternelle des réalités. J’appris que l’existence et la permanence des lois naturelles était une vérité sans contraire possible, que l’on était fou à vouloir en douter, que toute amélioration pratique